Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
29 novembre 2012 4 29 /11 /novembre /2012 05:28

Le cri du nouveau maire de Lampédusa

Sur le blog de Beppe Grillo 

 

Les cadavres qui arrivent tous les jours sur les plages de Lampedusa sont devenus un fait ordinaire, aussi régulier qu'une marée haute. L'Italie est la zone d'atterrissage pour les bateaux de l'espoir. Tout le monde sait d'où ces migrants viennent et pourquoi ils sont obligés de quitter leur patrie, mais personne ne fait quoi que ce soit. L'Italie est seule à s'attaquer au désespoir de l'Afrique, pendant que l'Europe regarde, comme si la tragédie n'avait rien à voir avec le continent, comme si elle n'était pas partiellement responsable du pillage des ressources africaines par les entreprises multinationales, avec la vente d'armes et le soutien de gouvernements dictatoriaux, avec la non-intervention, avec le "laissez-faire" face à une tragédie énorme comme celle du Darfur ou avec les guerres néocoloniales en Libye et ailleurs. Quelqu'un qui fuit l'enfer, de plus en plus fréquemment, finit dans le cimetière de Lampedusa qui maintenant n'a plus de place libre.

 

cimitero.jpg"Je suis le nouveau maire des îles de Lampedusa et Linosa. J'ai été choisi en mai et le 3 novembre, 21 cadavres m'ont été consignés. Ce sont des gens qui se sont noyés pendant qu'ils essayaient d'atteindre Lampedusa et pour moi c'est quelque chose qui est insupportable. Pour Lampedusa c'est un fardeau énorme de tristesse. En traversant la Préfecture, nous avons dû demander de l'aide aux maires de la province pour pouvoir offrir un enterrement digne aux 11 derniers corps, parce que notre cimetière n'a plus de places disponibles. Nous créerons plus de places. Mais je pose cette question à tout le monde: quelle taille devrais-je donner au cimetière de mon île? Je ne peux pas comprendre comment une telle tragédie peut être considérée normale. Comment est-ce que c'est possible d'enlever de la vie ordinaire, l'idée, par exemple, que 11 personnes, y compris 8 femmes vraiment jeunes et deux gosses de 11 et 13 ans peuvent mourir tous ensembles comme ça s'est passé samedi dernier, pendant un voyage qui aurait dû être le commencement d'une nouvelle vie pour eux? 76 d'eux ont été sauvés mais il y en avait 115 en tout. Le nombre de ceux qui sont morts est toujours beaucoup plus grand que le nombre de corps qui sont rendus par la mer. Je suis outragé par la normalité qui semble s'être étendue à tout le monde comme une contagion. Je suis scandalisé par le silence de l'Europe qui vient de recevoir le Prix Nobel de la Paix et qui est à nouveau restée silencieuse face à un massacre qui fait des milliers de victimes comme dans une véritable guerre. Je deviens plus convaincu que la politique européenne sur l'immigration considère cette offre de vies humaines comme une façon de restreindre les flux migratoires, ou peut-être comme une dissuasion. Mais, si pour ces gens, le voyage sur les bateaux est encore la seule possibilité d'espoir, je crois que leur mort en mer doit être une raison pour l'Europe de se sentir humiliée et déshonorée. Dans toute cette page vraiment triste de l'histoire que nous sommes en train d'écrire, la seule raison que nous avons d'être fier est offerte tous les jours par les hommes de l'Etat italien qui sauvent des vies humaines à une distance de 140 milles de Lampedusa, pendant que ceux qui étaient juste à 30 milles des gens qui ont fait naufrage, comme cela s'est passé samedi dernier, et qui auraient dû se dépêcher avec les bateaux à grande vitesse que notre gouvernement précédent a offerts à Khaddafi, ont ignoré leur appel à l'aide. Ces mêmes bateaux à grande vitesse sont utilisés dans la pratique pour séquestrer nos bateaux de pêche, même quand ceux-ci pêchent en dehors des eaux territoriales libyennes. Tout le monde doit savoir que c'est Lampedusa, avec ses habitants, avec les unités consacrées à fournir assistance et hospitalité, qui donnent la dignité d'êtres humains à ces gens, et qui donnent par conséquent une dignité à notre pays et à la totalité de l'Europe. Et dans ce cas, si ces gens sont seulement les nôtres, je veux recevoir des télégrammes de condoléances après que chaque personne noyée me soit consignée. Comme s'ils avaient la peau blanche, comme si chacun était le fils de quelqu'un qui s'est noyé pendant un congé de vacances." Giusi Nicolini, maire de Lampedusa

Partager cet article
Repost0

commentaires