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8 octobre 2013 2 08 /10 /octobre /2013 05:38
Comment l'État cache les demandeurs d'asile

Publié par Le Point.fr http://www.lepoint.fr/societe/comment-l-etat-cache-les-demandeurs-d-asile-30-09-2013-1736653_23.php

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Le nombre de réfugiés a augmenté de 72 % en cinq ans. Face à cet afflux, l'État oblige les collectivités locales à les prendre en charge. Enquête.

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À quelques mois des municipales, les Roms sont au coeur du débat politique. Hasard du calendrier ou non, une autre polémique pourrait bien s'inviter dans cette campagne électorale. En toute discrétion, début septembre, un rapport sur la situation des demandeurs d'asile a été rendu public sur le site du ministère de l'Intérieur. Le constat dressé est inquiétant : la France n'a plus les moyens d'assumer ses ambitions de terre d'asile. Et pour cause, entre 2007 et 2012, le nombre de réfugiés a flambé de 72 %.

Face à cet afflux, les préfectures ne parviennent pas à tenir la cadence et à respecter les délais administratifs. Plus surprenant, faute de places suffisantes dans les centres d'hébergement, l'État est contraint de louer des chambres d'hôtel.../... En attendant l'élaboration d'une nouvelle loi, prévue pour bientôt, le gouvernement tente de désenclaver les grandes villes en répartissant les demandeurs d'asile dans des communes rurales. Un cache-misère qui provoque souvent l'exaspération des élus locaux.

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"Aucun contact avec l'administration"

Depuis peu, Boulogne-sur-Gesse, un petit village tranquille de Haute-Garonne à une centaine de kilomètres de Toulouse, accueille plusieurs familles de réfugiés politiques. Contacté par Le Point.fr, le maire, Pierre Médevielle, fait part de son incompréhension : "Le sous-préfet m'a averti que des appartements vides (des HLM, NDLR) étaient réquisitionnés." Le premier édile n'en saura pas plus. Tout juste se murmure-t-il que cette opération a pour objectif de faire des économies. Les familles concernées étaient jusqu'alors logées dans des hôtels.

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Un maire démissionnaire

À Hauteville-Lompnes (dans l'Ain), l'afflux de demandeurs d'asile a conduit à la démission du maire PS Bernard Maclet. Retour en arrière. Dans une lettre du 8 octobre 2012, que Le Point.fr s'est procurée, Philippe Galli, préfet de l'Ain, réquisitionne l'immeuble de la Donchère. Le bâtiment, promis à la destruction, doit accueillir 120 demandeurs d'asile dans le cadre du plan hivernal. Problème, la ville accueille déjà 80 demandeurs d'asile. Malgré l'inquiétude de ses administrés, le maire opte pour une "attitude républicaine". Le 25 octobre 2012, le conseil municipal se prononce pour l'accueil de ces nouvelles familles, mais réclame la levée du dispositif dès la fin de l'hiver. "Le conseil avait été houleux. L'opposition dénonçait un envahissement", se souvient Bernard Maclet. Au coeur de l'hiver, Hauteville-Lompnes accueille 200 demandeurs d'asile, soit 5 % de sa population.

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Le 25 février 2013, dans une lettre adressée au préfet de l'Ain, Bernard Maclet menace de démissionner si le plan d'hébergement n'est pas levé. Un mois plus tard, Philippe Galli avise l'élu de la situation préoccupante de l'Ain quant à l'afflux des demandeurs d'asile. Le département connaît une hausse de 160 % des flux par rapport à l'année 2011 avec 627 arrivées en 2012 contre 241 en 2011. Compte tenu de ces éléments, le préfet ne peut qu'annoncer la présence des familles jusqu'à la fin 2013. Pour le maire, c'est la douche froide.

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Fin avril, nouveau conseil municipal, la tension est palpable. Une pétition réclamant le départ des réfugiés recueille 2 000 signatures. .../...Craignant une rupture des équilibres humains et sociaux, Bernard Maclet démissionne de ses fonctions. Ce que Philippe Galli refuse au motif "des valeurs" qu'incarne l'élu. Le 5 juin 2013, Philippe Galli est muté en Seine-Saint-Denis. Dans la foulée, son successeur entérine la démission du maire. Aujourd'hui encore, Bernard Maclet est amer. Il raconte avoir eu le sentiment d'être "abandonné par les pouvoirs publics".

Le problème des mineurs étrangers isolés

À l'autre bout de la France, en Mayenne, l'atmosphère n'est pas moins électrique. Le 24 juillet, Jean Arthuis, sénateur UDI et président du conseil général de la Mayenne, publie un arrêté mettant fin à l'accueil par ses services des mineurs étrangers isolés. La décision provoque la colère du gouvernement. …/…

La voix des associations

Seules intermédiaires entre les demandeurs d'asile (mineurs ou majeurs) et les municipalités, les associations sont en première ligne. Pierre Henry, président de l'association France Terre d'asile, accuse Jean Arthuis de faire "de la petite politique". …/…

De son côté, François Sureau, avocat et président-fondateur de l'association Pierre Claver (dont la mission principale est de fournir une aide juridique aux demandeurs d'asile, NDLR), juge que l'État est "assez défaillant depuis une dizaine d'années" sur la question des demandeurs d'asile. Pour cet énarque, l'État a tendance à déléguer des missions (logement, accueil) "dans des conditions discutables". L'avocat pointe aussi du doigt "des délais de décision trop longs". En conséquence de quoi François Sureau propose que les demandeurs puissent "travailler après six mois d'attente". Quant à l'hébergement des réfugiés, François Sureau voit rouge : "Contrairement à ses obligations conventionnelles, la France ne loge pas plus du tiers des réfugiés. C'est une situation inacceptable en droit."

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